Contre l’oppression fiscale, la pression des contribuables

Cheminots de la SNCF : grâce aux subventions payées par les contribuables, ils touchent une meilleure retraite que l’ensemble des Français

Bonne nouvelle : les crédits affectés par l’Etat aux régimes spéciaux – dont celui de la SNCF – devraient se tasser légèrement en 2015, après avoir progressé de 46 % entre 2006 et 2013. Mauvaise nouvelle : cette légère baisse,

Aucun doute, la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (CPRPSNCF, créée par décret le 7 mai 2007) va continuer à plomber durablement les comptes publics. C’est logique puisque ce régime, comme celui de la RATP, voit le nombre de ses cotisants (156 774, fin 2013) fondre année après année alors que celui des retraités demeure très largement supérieur (274 372), même s’il baisse également.

Pour combler la différence entre les cotisations versées et les prestations servies, l’État a deux solutions : réduire les avantages sociaux des retraités de la SNCF (pension de retraite plus élevée que dans le cas du régime général, bonifications…) ou sortir le carnet de chèques. Afin d’éviter un bras de fer avec les syndicalistes qui noyautent l’entreprise, les pouvoirs publics préfèrent passer à la caisse.

C’est grâce à cet artifice financier que la CPRPSNCF parvient à rester dans le vert. Contrairement à la plupart des autres régimes étudiés par le COR (le Conseil d’orientation des retraites), il s’est même offert le luxe d’être à l’équilibre (100,01 %) en 2012. Dans une étude publiée l’année dernière, l’institut de recherches économiques IREF estime que les cotisations sociales de la SNCF ne couvrent que 38 % de ses dépenses de retraite, 68 agents de la SNCF étant censés financer 100 pensionnés.

Depuis, l’adoption des normes comptables européennes (1er janvier 2007), le régime de retraite des salariés du rail n’est plus géré par la SNCF, mais par une caisse spécifique, un organisme de sécurité sociale de droit privé. Les comptes de la CPRPSNCF sont séparés de ceux du régime général et de ceux de l’entreprise, qui n’a pas besoin de provisionner la totalité de leurs engagements retraite. La caisse reste cependant placée sous la tutelle de l’État… qui comble le déficit.

La CPRPSNCF assure la gestion de ce régime spécial au titre des pensions et prestations de retraite servies aux anciens agents ainsi que les prestations de prévoyance versées aux agents, aux retraités et à leurs familles.

Malgré la mise en place récente d’un système de décote et de surcote, le régime dont profitent les ex-salariés de la SNCF est beaucoup plus généreux que le régime général.

Pour amortir les effets de la réforme des retraites de 2008 (allongement de deux ans de la durée de cotisation), la SNCF a créé un échelon d’ancienneté supplémentaire ou des majorations de traitement en fin de carrière. La réforme de 2010 a supprimé l’obligation de départ à 50 ans pour les conducteurs de train et à 55 ans pour les cheminots. A partir du 1er janvier 2017, l’âge d’ouverture du droit est porté progressivement de 55 ans à 57 ans (50 ans à 52 ans pour les agents de conduite) pour les agents de la SNCF nés après le 1er janvier 1962 ou du 1er janvier 1967 pour les agents de conduite. Pour ceux nés avant le 1er janvier 1962, la donne est encore plus favorable avec un départ possible dès 55 ans pour les sédentaires et à 50 ans pour les « roulants ». Autre précision : l’âge maximum de maintien en service de 65 ans sera progressivement relevé à 67 ans.

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Des pensions supérieures à la moyenne nationale

Enfin, si la loi du 20 janvier 2014 a prévu un relèvement progressif de la durée d’assurance de l’ensemble des régimes pour l’obtention d’une retraite à taux plein, cette mesure s’échelonne selon un calendrier spécifique pour les salariés de la SNCF. Il y a de la marge. Selon un récent rapport du COR, l’âge moyen de départ en retraite à la SNCF était de 55,1 ans en 2011, soit 7 ans de moins que dans le cadre du régime général.

Non contente de permettre un départ à la retraite plus rapide que dans le régime général, la CPRPSNCF donne aussi à ses agents la possibilité de quitter la vie active dans des conditions financières enviables. Selon le COR, la pension moyenne annuelle d’un retraité de la SNCF s’élevait à 1 917 euros par mois en

2011, bien davantage que la moyenne nationale qui était de 1 288 euros par mois en 2012… Et, en dépit des réformes, la pension des retraités de la SNCF pourrait encore augmenter pour se situer entre 3 400 et 3 900 euros par mois à horizon 2060, estime le COR.

Pour financer ce régime de faveur, les contribuables seront constamment appelés à la rescousse. En 2013, le COR estimait que le déficit du régime ne cesserait pas de se creuser au fil des ans. La dotation d’équilibre versée par l’État devrait atteindre 3,6 milliards en 2030, 4,2 milliards en 2040, 4,9 milliards en 2050, et culminer à 5,7 milliards en 2060.

« À l’heure de l’ouverture du rail à la concurrence, on se demande comment une entreprise comme la SNCF pourra rester compétitive sans changer de mode de gouvernance », s’interroge l’IREF, en soulignant que les agents de la SNCF, non contents de prendre les Français en otages, bénéficient d’un régime de retraite, payé pour une grande part…par ceux qu’ils empêchent de circuler librement !                            HENRI DUMAINE

Photo de une : © Shutterstock

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